Non à la guerre! Non à la bombe iranienne!

Submitted by martin on 24 May, 2012 - 4:08

Un éditorial qui a paru dans le numéro 232 du journal socialiste britannique Solidarity publié par l’Alliance for Workers Liberty.


Les inspecteurs de l'Agence internationale d'énergie atomique (AIEA) sont actuellement en visite en Iran. En novembre 2011, l’agence rapportait que l'Iran avait procédé à des essais «ayant un rapport avec le développement d'un engin nucléaire explosif».

Elle était également préoccupée par l'enrichissement d'uranium de niveau moyen à l'usine Iran Fordo près de Qom dans le nord de l’Iran. La technologie qui permet l'enrichissement de l'uranium de niveau supérieur est une condition préalable pour développer des armes nucléaires. C'est pourquoi l'enrichissement d'uranium a été une «ligne rouge» pour les États-Unis, l'Union Européenne, Israël, les États du Golfe et d'autres. Le rapport de l'AIEA a déclenché un accroissement d'un conflit qui dure depuis une dizaine années .

À la fin de novembre, les États-Unis, le Royaume-Uni et le Canada ont annoncé de nouvelles sanctions bilatérales contre l'Iran. Les sanctions ont été dit-on ciblées sur les achats militaires, le commerce et les transactions financières effectuées par le Corps des Gardiens de la Révolution islamique, qui contrôle le programme nucléaire et possède de grandes parties de l'économie.

Dans le même mois Israël a testé un missile balistique de longue portée. Le test est venu après une semaine de spéculations dans la presse israélienne pour savoir si leur gouvernement avait décidé d'attaquer des complexes nucléaires de l'Iran.

Le 11 janvier, un scientifique nucléaire iranien a été tué par l’explosion d’une voiture piégée à Téhéran. C'était la quatrième attaque du genre en deux ans. Des responsables iraniens ont accusé les États-Unis et Israël.

En janvier dernier, l'UE a annoncé des sanctions qui (à partir de juillet) interdiront l'importation, l'achat et le transport de pétrole brut iranien, de produits pétroliers ainsi que de produits liés à la finance et aux assurances aux pays de l'UE.

Sur ce point l'Iran avait déjà menacé de fermer le détroit d'Ormuz - la voie de transport pour environ un cinquième de l'huile commercialisée dans le monde. En réponse, les États-Unis avaient déclaré que leur Cinquième Flotte basée à Bahreïn à proximité défendrait la voie navigable et, si nécessaire, riposterait par les armes contre l'Iran.

Tous les côtés continuent d'envoyer des messages contradictoires. Le 26 janvier un rapport de l’Institut pour la science et la sécurité internationales (financé par le Congrès des États-Unis) a déclaré, «Il est peu probable que l’Iran se décide à se lancer vers la fabrication d'armes nucléaires aussi longtemps que sa capacité d'enrichissement d'uranium reste aussi limitée que ce qu'elle est aujourd'hui». Le même jour, le président Mahmoud Ahmadinejad a déclaré qu'il était prêt à des discussions sur l'enrichissement d'uranium.

Dans l’issue «douce», l'Iran reprendra les négociations sur l'enrichissement d'uranium qui se sont effondrées l'année dernière. Que faire si ça n’arrive pas?

Les grandes puissances, de toute évidence, ne veulent pas la guerre, mais leurs actions dérivent vers une situation où les événements pourraient facilement échapper à tout contrôle et dans une guerre qui mettrait toute la région en flammes, alors que l'Iran utilise l'action par procuration par le Hamas et le Hezbollah pour se défendre.

La guerre serait extrêmement impopulaire aux États-Unis, mais les États-Unis pourraient à nouveau tomber en guerre. Israël a récemment assoupli sa position, mais de nombreux «faucons» font pression pour une attaque militaire israélienne.

Certains récits du conflit, tels que ceux de Pepe Escobar sur Al Jazeera, font valoir que «ça ne concerne que le pétrole». Les alliances commerciales de l'Iran avec la Chine, le Pakistan, etc, sont une menace croissante pour les intérêts américains au Moyen-Orient.

D'autres pensent que l'administration Obama a adopté la même ligne de«changement de régime» sur l'Iran que Bush avait eu en Irak et en Afghanistan. Mais ces analyses insèrent des événements dans un cadre qui ne convient pas.

La Chine n’est pas engagée envers l'Iran. Elle a poussé l'Iran à négocier. L'Iran ne devient pas inexorablement plus fort. Son principal allié, le régime d'Assad en Syrie, est affaibli.

Les stratèges de Bush pensaient qu’une attaque militaire «brève et brusque» déclencherait un changement de régime en Irak, et aurait réussi à déclencher un changement de régime en Afghanistan. Aujourd'hui les stratèges américains savent qu’un changement de régime ne pourrait pas être imposé de manière réaliste à l'Iran par une action militaire de l'extérieur, plus particulièrement depuis que le régime iranien a écrasé l'opposition interne en 2009.

Ce conflit est encore,et principalement, à propos du potentiel d'une bombe nucléaire iranienne. L’arrêt de la «prolifération nucléaire» - plus de bombes à la fois dans des territoires nouveaux et anciens - est le point central ici. La possession d'une bombe nucléaire rendrait l'Iran plus agressif dans sa politique étrangère, exprimé principalement par le biais de son soutien à des groupes comme le Hamas et le Hezbollah.

Des déclarations fréquentes d'Ahmadinejad à l’effet que «l'entité sioniste» «disparaîtra» et «ira en enfer», ainsi que la ferveur religieuse du régime, indiquent que l'Iran doté d'armes nucléaires pourrait réellement utiliser ses armes nucléaires contre Israël.

La perspective d'un Iran ayant une bombe est alarmante. De répondre «Israël a obtenu la bombe, pourquoi pas l'Iran?» détourne la question.

Bien sûr, nous sommes contre qu’Israël - ou les États-Unis ou la Grande-Bretagne - ait des armes nucléaires. Mais l'Iran est un régime clérico-fasciste explicitement engagé à faire «disparaître» un autre État dans sa région (Israël). Et nous ne pouvons certainement pas faire confiance au régime iranien quand il affirme que son programme nucléaire porte uniquement sur la modernisation de l'économie ou la «diversification» de son approvisionnement énergétique.

Il serait bon si l'Iran reculait au sujet de l'enrichissement nucléaire. Mais les socialistes ne peuvent pas approuver les dernières sanctions économiques. Elles augmentent le risque de guerre, surtout à une époque d’un conflit factionel violent entre deux ailes «conservatrices» de l’État clérico-fasciste iranien sur les élections (hautement truquées) du mois prochain (NDLT : cet article a été écrit en février dernier). Ahmadinejad et la machine gouvernementale «civile» sont aux prises avec le dirigeant suprême, l'Ayatollah Ali Khamenei, et sa hiérarchie religieuse personnellement nommée par lui.

Il n'y a pas de «sanctions habiles», des sanctions qui frapperaient seulement la puissance de l'Iran, pas plus qu'il n'y en avait contre l'Irak en 1991-2003. Dans une société très inégale, comme l'Iran, la classe ouvrière souffrira tôt ou tard, d'un effondrement économique; des emplois seront perdus, et les prix alimentaires de base vont augmenter, alors que le régime et les capitalistes préserveront leurs intérêts.

Les sanctions aideront le régime en place à susciter un soutien nationaliste dans sa défense (y compris de la part de l’opposition «verte»).

Nous sommes contre les sanctions et la campagne de guerre et nous sommes résolument avec la classe ouvrière iranienne contre le régime iranien.

Pour préparer le bon «ton moral» pour les prochaines élections, le régime a commencé la nouvelle année en exécutant trois personnes par jour. Qui ont-ils tués? Des Afghans iraniens. Des militants kurdes, des personnes politiques, et des personnes qu'ils appellent «hérétiques» (des libéraux à l’esprit laïque qu'ils n'aiment pas). Nous sommes en solidarité avec les prisonniers dont la vie est en jeu.

Nous sommes solidaires avec les travailleurs iraniens qui font encore périodiquement la grève, alors même qu'ils sont confrontés à des licenciements de masse (et pire), et qui luttent contre des conditions où ils n'ont pas de droits du travail. Leurs organisations sont précaires, et précieuses. Nous nous opposons à la dérive vers la guerre au nom de cette solidarité.

• Non à la guerre! • Non à la République islamique! • Solidarité avec les travailleurs iraniens!

Traduction de Hugo Pouliot

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