Les États-Unis se retirent d'Irak

Submitted by martin on 22 December, 2011 - 1:02

A la fin du mois de décembre, les dernières troupes américaines se retireront d'Irak, huit ans et huit mois après l'invasion de mars 2003.

Bâclant jusqu’à la fin, les États-Unis ont envoyé le vice-président Joe Biden pour visiter l'Irak en déclarant l'opération comme un succès, et il dissertait à un public perplexe sur les grandes choses que les États-Unis ont fait à Bakou. Bakou est en Azerbaïdjan et non pas en Irak.

L'invasion a été le produit d'une vague de triomphalisme américain après l'effondrement du stalinisme russe et européen en 1991, les succès de l'armée américaine au Koweït (1991), en Bosnie (1995), et au Kosovo (1999), et le succès militaire apparent des États-Unis en Afghanistan (2001).

En envahissant, les politiciens américains autour de George Bush pensaient qu'ils pouvaient couper court à un éventuel processus du dictateur irakien Saddam Hussein pour retrouver progressivement le soutien régional et l'influence qu'il avait perdu après la guerre du Koweït en 1991. Avec un coup rapide et brusque, ils ont pensé qu'ils pourraient obtenir un régime pro-américain et favorable au marché en Irak et l'utiliser comme un levier pour transformer le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, qui seraient autrement tombés aux islamistes politiques quand les vieux dictateurs décrépits comme Moubarak, Assad, Kadhafi, Ben Ali, et la monarchie saoudienne s’en iraient finalement.

Dans ces conditions l'invasion a lourdement échoué. L'Irak a un gouvernement dominé par les islamistes chiites et le gouvernement iranien, haï par les États-Unis, a probablement plus d'influence en Irak maintenant que les États-Unis, malgré le fait que 16 000 citoyens américains (le personnel de la gigantesque ambassade de Bagdad, et les mercenaires paramilitaires) restent en Irak.

Le poids des États-Unis dans la région et le monde a diminué.

Les États-Unis ont déclaré à plusieurs reprises qu'il veulent un règlement à deux États en Israël / Palestine, et rapidement, mais ils ont été incapable de produire même un coup de pouce significatif dans cette direction.

L'effondrement des anciennes dictatures qui ont dominé le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord depuis des décennies est maintenant en cours, avec le «printemps arabe». L'effet de la guerre en Irak sur ce résultat a sans doute été d'aider les islamistes qui maintenant, avec les résultats des élections en Egypte et en Tunisie et les premières déclarations des dirigeants post-Kadhafi en Libye, semblent prendre le dessus.

Il n’y a pratiquement personne en Irak qui ait approuvé de manière positive l'invasion américaine.

Certains membres de la majorité chiite irakienne, longtemps étouffée par Saddam, étaient au début disposés à contrecœur pour accueillir le renversement par les États-Unis du dictateur et pour traiter avec les troupes américaines sur une base prudente «d’attendre et de voir», en espérant qu'ils mettraient de l’ordre et quitteraient bientôt. Hassan Jumaa, dirigeant du syndicat des travailleurs du pétrole qui a surgi dans le sud de l'Irak après la chute de l’État policier de Saddam, a déclaré: «L'occupation est comme un mal de tête, mais Saddam était comme la mort».

La méfiance s'est vite transformée en hostilité ouverte, alors que les États-Unis ont détruit maladroitement la structure d'un gouvernement civil en Irak et ont fait basculer le pays dans un chaos dirigé par des bandits, sur lequel les Américains ont marché à grandes enjambées en exigeant des impôts à taux unique et des privatisations rapides.

Les États-Unis ont été entraîné vers une longue présence militaire. Le chaos a conduit la majorité des Irakiens à exiger que les États-Unis se retirent - mais aussi de dire que le retrait ne devrait venir qu'après qu’un peu d'ordre civil ait été rétabli, de sorte que le retrait ne ferait pas basculer le pays dans une guerre civile sectaire de grande envergure et la destruction de toutes les opportunités limitées pour les mouvements démocratique et ouvrier qui furent ouvertes avec la chute de Saddam Hussein.

Les socialistes espéraient que le nouveau mouvement ouvrier irakien influencerait la reconstruction.

En fait, après une année de guerre civile sectaire quasi-explosive en 2006, l'épuisement agité vers lequel la société irakienne est finalement tombée à partir de la fin de 2007 était sous la domination d'une cabale de partis chiites islamistes, dans une alliance peu structurée avec les nationalistes kurdes, qui ont progressivement reconstruit une machine d'État autour d'eux.

Le mouvement ouvrier irakien reste vivant, quoique amoché et encore à peine semi-légal, puisque les anciennes lois anti-syndicales de Saddam restent en vigueur et ont été complétées par d'autres.

Il aura encore besoin de notre solidarité après le retrait américain.

Traduction de Hugo Pouliot

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