L'histoire du mouvement des objecteurs de conscience israéliens

Submitted by AWL on 8 December, 2013 - 10:56

Traduction par Hugo Pouliot


Dès la formation de l'Etat d'Israël en 1948, le service militaire a été une question politisée. Compte tenu de la petite taille et de la population du pays, l'État a compté sur la conscription pour maintenir sa capacité militaire.

Lorsque la politique a d'abord été mise en application, des exceptions ont été faites pour les Arabes. Ensuite, un accord a été obtenu par lequel les Juifs ultra-orthodoxes étaient exemptés du service s'ils étaient inscrits dans une école religieuse. Il y a eu aussi des exemples occasionnels de personnes refusant de servir pour des raisons pacifistes, comme l'avocat Amnon Zichroni dans les années 1950.

Comme Israël est devenu un État de plus en plus expansionniste, le refus de servir a pris une plus grande importance politique. En 1982, 168 militaires ont été emprisonnés pour avoir refusé de prendre part à la guerre d'Israël avec le Liban. Yesh Gvul ( "Il y a une limite") a été fondé la même année. Il décrivit la guerre comme "un acte d'agression délibéré et futile" . Une pétition de Yesh Gvul portant les noms de 3.000 réservistes a été présenté au Premier ministre Menahem Begin et au ministre de la Défense Ariel Sharon.

En 1988, lors de la première Intifada, un soldat de Tsahal Adam Keller, et un partisant de longue date de Yesh Gvul, a été pris à griffonner des slogans sur les côtés des murs, sur les portes des toilettes et même sur les côtés des tanks. Les slogans dénonçaient l'occupation et appellaient les autres soldats à refuser de servir dans les territoires occupés. Keller a été traduit en cour martiale et condamné à trois mois d'emprisonnement pour "diffusion de propagande nuisible à la discipline militaire" . Un an plus tard, le prédécesseur de Workers Liberty, Socialist Organiser, a organisé une tournée de conférences en Grande-Bretagne pour Keller, qui est resté une personnalité importante de la gauche israélienne depuis ce temps.

Le mouvement est réapparu à la fin des années 1990 et au début des années 2000. En 2002, une lettre ouverte a été envoyée au gouvernement israélien par des soldats déclarant leur refus de servir "au-delà des frontières de 1967 pour dominer, expulser, affamer et humilier un peuple tout entier" . La lettre a finalement été signée par plus de 600 militaires. En 2003 , 27 pilotes de Tsahal ont publié une lettre déclarant leur opposition au largage d'une bombe sur un dirigeant du Hamas, qui avait tué de nombreux civils dans le processus. La lettre faisait valoir que la poursuite de l'occupation était immorale et indéfendable. Les pilotes ont subi une pression publique et institutionnelle intense, avec de nombreux d'entre eux qui furent congédiés d'emplois non seulement militaires, mais aussi de l'aviation civile.

En 2001, un mouvement d'étudiants du secondaire qui refusent de servir a été réformé sur la base d'une organisation qui existait dans les années 1970 ( "Shministim" ). Beaucoup de ces jeunes sont allés en prison pour leur décision. Embarrassant pour l'establishment israélien, certains de ceux emprisonnés étaient des enfants ou des parents de militaires de haut rang, comme Omer Goldman, fille d'un officier de haut rang du Mossad, Naftali Granot .

La propagation du refus militaire conduisit à une répression administrative et une campagne d'hystérie morale de la classe dirigeante israélienne. La presse de droite se déchaîna contre les traîtres donnant supposément un encouragement au Hamas et au Hezbollah. En 2002, la Haute Cour de justice a jugé que "le pacifisme absolu" était une base juridique pour refuser le service, mais que de refuser de servir dans des territoires ou des campagnes particuliers, "le refus sélectif ", était illégal et punissable par l'emprisonnement. Cela a créé la situation perverse où l'on peut éviter la punition pour une opposition abstraite ou religieuse à la guerre, mais être puni pour tout simplement faire preuve de perspicacité morale.

Le mouvement des objecteurs de conscience reste une tendance politique minoritaire dans une société empoisonnée par le militarisme. Néanmoins, le courage des objecteurs de conscience mérite notre soutien, et nous rappelle que la société israélienne n'est pas un bloc homogène d'oppresseurs, mais une société de classe divisée par des tendances politiques qui s'affrontent.

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